Comment développer la confiance en présentiel et distanciel ?

Laurent Bouguennec – 22 décembre 2023

Lecture de 5 min

Faire confiance, la vraie sans contrôle, est source d’une économie de temps et d’énergie et à de nombreuses autres vertus.

Pour autant, franchir le cap n’est pas chose aisée.

C’est un pari que l’on fait avec l’envie de gagné et en tête une possible déception.

C’est normal d’avoir peur, rassurez-vous.

Dans cet article, je vous propose d’aller explorer un à un les différents composants de l’équation de la confiance.

Agir sur les leviers du numérateur

Ces trois premiers leviers sont fondamentaux.

Si un seul est à la valeur zéro, la confiance sera de facto à zéro.

1. Développer l’intimité

En présentiel, l’intimité se crée naturellement, par petites touches d’expériences communes que nous partageons au quotidien (pause-café, réunion d’équipe, déjeuner commun…).

Mais à distance, c’est une autre histoire.
Un coup de pouce est nécessaire.

Vous êtes plutôt approche one-shot ?

Je vous propose un exercice à réaliser avec votre équipe, en y participant également.

Phase 1 :
: 2 X (20 min d’interview + 5 min de restitution par passage)
Organiser des interviews entre membre de l’équipe où la personne qui mène l’interview devra présenter la personne.

Phase 2
: 2 X (20 min d’interview + 5 min de restitution par passage)

Idem phase 1 en changeant les groupes, mais en orientant les questions :
•         Quel est le métier que tu voulais faire lorsque tu étais enfant ?
•         Quels sont tes hobbies ?
•         Une réussite, petite ou grande, dont tu es fier ces deux dernières années ?
•         Quand tu as besoin d’aide, la première chose que tu fais c’est …
•         Dans la vie, qu’est-ce qui est important pour toi ?
•         Donne-moi 3 qualités que les gens qui te connaissent bien reconnaissent ?
•         Quels sont les sujets qui te mettent en colère ?
•         Qu’est-ce qui te met en joie ?

Ou plutôt approche rituel ?

Organiser des P’tit dej virtuel par exemple.
Prendre un moment en équipe en visio pour parler de tout sauf du boulot.
L’occasion d’aborder ensemble des sujets légers ou non.

One-shot, Rituel, l’un n’empêche pas l’autre, bien au contraire

2. Développer la fiabilité

En présentiel ou à distance, même combat.
Si vous prenez un engagement, respectez-le.

𝗨𝗻 𝗽𝗿𝗶𝗻𝗰𝗶𝗽𝗲 𝗽𝗵𝗮𝗿𝗲 : « 𝐿𝑎 𝑓𝑎𝑐̧𝑜𝑛 𝑑𝑜𝑛𝑡 𝑡𝑢 𝑓𝑎𝑖𝑠 𝑢𝑛𝑒 𝑐ℎ𝑜𝑠𝑒 𝑒𝑠𝑡 𝑙𝑎 𝑓𝑎𝑐̧𝑜𝑛 𝑑𝑜𝑛𝑡 𝑡𝑢 𝑙𝑒 𝑓𝑎𝑖𝑠 𝑒𝑛 𝑔𝑒́𝑛𝑒́𝑟𝑎𝑙𝑒 ».

Ça commence par des choses insignifiantes :
– Arriver à l’heure à un rendez-vous ou une réunion
– Si vous dites que vous rappelez, alors rappelez

La vie nous joue parfois des tours, et si vous ne pouvez pas respecter votre engagement :
– Prévenir dès que possible
– Remercier pour l’attente, la patience, sa compréhension

Inutile de se flageller et se confondre en excuse, ça ne changera rien.
Si vraiment cela vous affecte, prouvez-le à votre interlocuteur en mettant cette énergie dans le respect de vos engagements.
« 𝑆ℎ𝑜𝑤, 𝑑𝑜𝑛’𝑡 𝑡𝑒𝑙𝑙 ».

𝗖𝗼𝗺𝗺𝗲𝗻𝘁 𝗱𝗲́𝘃𝗲𝗹𝗼𝗽𝗽𝗲𝗿 𝗹𝗮 𝗳𝗶𝗮𝗯𝗶𝗹𝗶𝘁𝗲́ 𝗱𝗲𝘀 𝗽𝗲𝗿𝘀𝗼𝗻𝗻𝗲𝘀 𝗮̀ 𝗱𝗶𝘀𝘁𝗮𝗻𝗰𝗲 ?

1. Commencer par soi-même, en mettant en place un management par objectifs et non au présentiel.

2. Poser votre cadre

3. Faire du feedback et/ou recadrage si débordement, y compris sur les choses insignifiantes. « Qui ne dit mot consent »

4. Avoir un point d’avancement régulier (idéalement une fois par semaine) afin de vous sécuriser et sécuriser la personne.

5. Être exemplaire de votre côté

3. Développer la crédibilité

Derrière ce mot se cachent deux notions : 𝗹𝗮 𝗰𝗼𝗻𝗻𝗮𝗶𝘀𝘀𝗮𝗻𝗰𝗲 𝗲𝘁 𝗹𝗮 𝗰𝗼𝗺𝗽𝗲́𝘁𝗲𝗻𝗰𝗲

Pour pouvoir faire confiance, pour miser sur l’autre, il faut estimer que la personne possède les connaissances et compétences nécessaires (ou si elle peut les acquérir dans l’espace-temps prévu).

Sans preuve concrète, sans fait observable, c’est comme viser une cible à 200 m avec un tromblon.

Prendre des décisions, miser sur l’autre, en se basant sur cet outil infaillible qu’est le pifomètre, relève pour certain du courage.
Moi j’appelle ça de la bêtise.

𝗖𝗼𝗺𝗺𝗲𝗻𝘁 𝗱𝗲́𝘃𝗲𝗹𝗼𝗽𝗽𝗲𝗿 𝗹𝗮 𝗰𝗿𝗲́𝗱𝗶𝗯𝗶𝗹𝗶𝘁𝗲́ 𝗱𝗲𝘀 𝗽𝗲𝗿𝘀𝗼𝗻𝗻𝗲𝘀 𝗮̀ 𝗱𝗶𝘀𝘁𝗮𝗻𝗰𝗲 ?

1. Prendre conscience du niveau de connaissance et compétence que l’on attend

2. TESTER par des questions

3. TESTER par des cas fictifs

4. TESTER par des cas réels sans faire confiance

5. TESTER si en face c’est un COCO le perroquet

6. Et accompagner la personne dans sa montée en compétences et connaissances

Agir sur les leviers du dénominateur

1. Réduire l’agenda personnel

« 𝑃𝑎𝑝𝑎, 𝑡𝑢 𝑠𝑎𝑖𝑠 𝑞𝑢𝑒 𝑗𝑒 𝑡’𝑎𝑖𝑚𝑒, 𝑡𝑢 𝑝𝑜𝑢𝑟𝑟𝑎𝑖𝑠…»

Y a des situations où ça sent l’arnaque à 10 km à l’avance
Et d’autre où c’est beaucoup subtil.

Votre équipe est composée d’êtres humains avec :
– des besoins présents
– des aspirations pour le futur
Et ils avancent plus ou moins masqués.

Imaginez, une personne qui vise une promotion à un poste en interne peut adopter le discours suivant : « d’ailleurs, j’en profite pour te dire que j’envisage dans mon prochain poste de ….. ».
Les choses sont claires.

Mais si maintenant elle nous dit…rien.
Son intention sera toujours là et elle influencera ses comportements.
Vous allez le sentir, sans forcément réussir à expliquer, que quelque chose cloche.
Du coup, difficile de faire confiance.

𝗖𝗼𝗺𝗺𝗲𝗻𝘁 𝗿𝗲́𝗱𝘂𝗶𝗿𝗲 𝗹’𝗮𝗴𝗲𝗻𝗱𝗮 𝗽𝗲𝗿𝘀𝗼𝗻𝗻𝗲𝗹 ?

Je dis bien réduire car il n’arrivera jamais à 0.

Ça sous-entendrais déjà de parfaitement se connaitre et d’être transparent à 100%.

Vous dites tout vous à votre famille, à vos amis ?

𝗨𝗻 𝗽𝗿𝗶𝗻𝗰𝗶𝗽𝗲 𝗾𝘂𝗲 𝘃𝗼𝘂𝘀 𝗽𝗼𝘂𝘃𝗲𝘇 𝗴𝗮𝗿𝗱𝗲𝗿 𝗲𝗻 𝘁𝗲̂𝘁𝗲 : ” je ne sais pas, je demande”.

Demander aux membres de votre équipe.

Profiter de vos 1 :1 pour aborder le sujet.

L’occasion de l’aider dans son cheminement personnel si c’était inconscient ou de crever l’abcès avant qu’il ne s’envenime.

2. Réduire notre peur des conséquences

« 𝐶̧𝑎 𝑣𝑎 𝑒̂𝑡𝑟𝑒 𝑝𝑜𝑢𝑟 𝑚𝑎 𝑡𝑟𝑜𝑛𝑐ℎ𝑒 »
« 𝐽’𝑎𝑖 𝑝𝑎𝑠 𝑒𝑛𝑣𝑖𝑒 𝑑𝑒 𝑚𝑒 𝑝𝑟𝑒𝑛𝑑𝑟𝑒 𝑢𝑛𝑒 𝑠𝑜𝑢𝑓𝑓𝑙𝑎𝑛𝑡𝑒 𝑝𝑎𝑟 𝑙𝑒 𝑁+1 »
« 𝐶’𝑒𝑠𝑡 𝑢𝑛 𝑐𝑙𝑖𝑒𝑛𝑡 𝑖𝑚𝑝𝑜𝑟𝑡𝑎𝑛𝑡, 𝑙𝑒 𝑝𝑒𝑟𝑑𝑟𝑒 𝑠𝑒𝑟𝑎𝑖𝑡 𝑐𝑎𝑡𝑎𝑠𝑡𝑟𝑜𝑝ℎ𝑖𝑞𝑢𝑒 »
…

À l’idée de confier une tâche à un membre de votre équipe et de lui faire confiance (= absence de contrôle), votre dialogue interne s’affole.
C’est normal, la peur est un signal pour vous prévenir d’un danger.

𝗟𝗮 𝗾𝘂𝗲𝘀𝘁𝗶𝗼𝗻 𝗲𝘀𝘁 𝗱𝗲 𝘀𝗮𝘃𝗼𝗶𝗿 𝘀𝗶 𝗰’𝗲𝘀𝘁 𝗹𝗮 𝗽𝗲𝘂𝗿 𝗾𝘂𝗶 𝗱𝗶𝗰𝘁𝗲 𝘃𝗼𝘀 𝗰𝗼𝗺𝗽𝗼𝗿𝘁𝗲𝗺𝗲𝗻𝘁𝘀 𝗼𝘂 𝘀𝗶 𝗰’𝗲𝘀𝘁 𝘃𝗼𝘂𝘀 𝗾𝘂𝗶 𝗰𝗼𝗺𝗽𝗼𝘀𝗲𝗿 𝗮𝘃𝗲𝗰 𝗲𝗹𝗹𝗲 ?

Pour s’assurer que c’est bien vous qui tenez la laisse, il est important de faire preuve de discernement sur :
– votre capacité à assumer l’échec et ses conséquences
– votre gestion du risque calculé

𝗤𝘂𝗲𝗹𝗾𝘂𝗲𝘀 𝗾𝘂𝗲𝘀𝘁𝗶𝗼𝗻𝘀 𝗮𝗶𝗱𝗮𝗻𝘁𝗲𝘀 :
– Au pire du pire, il se passe quoi si ça foire ?
–  Est-il possible de rattraper le coup si ça foire ?
–  Quelle est la probabilité que ça ne fonctionne pas ?
–  Quelles actions en amont je peux mettre en place pour réduire le risque d’échec ?

Et si in fine, en conscience, vous jugez qu’il est trop dangereux de faire confiance, c’est OK.
Expliquez aux membres de votre équipe les raisons de ce choix (sinon c’est la porte ouverte à toutes les fenêtres de l’interprétation)

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3. Réduire l’emprise de nos paris perdus

Accepter le pari de la confiance, c’est accepter de se mettre en danger, de s’exposer à la douleur de l’échec.

Depuis notre tendre enfance, nous vivons la douleur des paris manqués avec son florilège de réactions non-aidantes :

« tu m’as trahi » (la non-responsabilisation, je n’assume pas de mettre trompé, je rejette la faute sur l’autre)
« tu vas me le payer » (la vengeance est aux commandes, va y avoir du sang sur les murs)
« Je suis bête, je n’aurais jamais dû te faire confiance » (l’autoflagellation toujours intéressant pour diminuer la confiance et estime de soi)

Mais qui n’a pas souffert d’une confiance mal placée en telle ou telle personne ?

Nous avons tous nos blessures de guerre.

That’s life.