Arrête de vouloir des collaborateurs, cherche des militants
Laurent Bouguennec – 30 septembre 2024
Lecture de 5 min
Pourquoi les personnes n’obéissent pas aux ordres, pourquoi ne sont-elles pas plus productives, pourquoi ?
C’est la faute de la génération Z.
C’est la faute du télétravail.
C’est la faute de…
Mouai
Au-delà de fuir sa propre responsabilité, c’est un poil plus compliqué que ça.
Et finalement, c’est peut-être même une bonne chose.
9 profils face à la notion d’obéissance
Mes recherches et lectures m’ont amené à déterminer différent type de profils
2 grands axes :
- la réaction aux ordres (suiveur – critique – profiteur)
- le niveau d’agressivité (excessif – sain – déficient)
À noter que :
- Comme toute grille de lecture, ce n’est pas une vérité, ce n’est pas parfait, mais c’est mieux que rien.
- Nous n’appartenons pas à vitam æternam à l’une ou l’autre catégorie, c’est mouvant selon les évènements que nous traversons dans nos vies au sens large.
Les suiveurs
Dans ce groupe, tu vas trouver les personnes qui obéissent
1. Les fanatiques
Ce sont les personnes zélées qui vont être prêtes à suivre aveuglément toutes les consignes qui vont leur être données.
Y compris des actes consciemment violents, immoraux et non éthiques.
Cette obéissance est poussée par des passions démesurées et/ou une raison absolue supérieure.
Exemple : le soldat prêt aux pires exactions (pour ne pas dire saloperies)
Dans une entreprise, ce type de profil est dangereux, car incapable de prendre des décisions tempérées.
Après, il serait naïf de croire à l’absence d’homme de main prêt à tout dans les grandes structures.
2. Les collaborateurs
Ce sont les personnes plus ou moins zélées qui vont suivre toutes les consignes qui vont leur être données sans être violentes directement en :
– fermant les yeux sur les conséquences, qui peuvent être horribles, de leurs actes,
– refusant la responsabilité des acteurs au nom de l’obéissance à des ordres.
Des rouages dans le grand tout, mais qui manquant viennent gripper la machine.
Cette obéissance est liée à une acceptation consciente (j’ai réfléchi et je fais le choix de) ou inconsciente (absence de réflexion et influences diverses).
Exemple : Personnage tristement célèbre : Eichmann avec cette phrase célèbre “J’ai fait mon devoir, conformément aux ordres. Et on ne m’a jamais reproché d’avoir manqué à mon devoir.”
Dans une entreprise, ce type de profil est également dangereux car incapable de prendre des décisions sortant du schéma de pensée dominant (en sortir serait désobéir).
Ils entretiennent bêtement une machine possiblement mortifère.
3. Les moutons et les résignés
Dans ce groupe, les personnes passives, qui vont obéir sans zèle, voire carrément à traîner la patte.
a. Les moutons
Le gros des troupes, ce sont des personnes qui n’ont rien demandé et qui se retrouvent embarqués.
Elles se retrouvent là par habitude (école, famille, …) et entretenues par des formes d’abrutissement (média, loisirs, réseaux sociaux,…) qui empêchent la réflexion et verrouillées par la dépendance à un niveau de vie.
C’est cette catégorie que la Boétie dans son “Discours de la servitude volontaire” aborde.
Exemple: Mr et Mme tout le monde
Dans une entreprise, ce type de profil énerve tout le monde car :
- les personnes font, mais pas assez.
- absence de prise d’initiative ou de sortie de la fiche de poste.
Mais aller trop la titiller est risqué.
Par son simple nombre, cette catégorie est en capacité de changer la donne des rapports de forces quand elle se réveille et se met à désobéir.
b. Les résignés
Ce sont les personnes qui par le passé ont désobéi mais pour lesquelles le prix à payer a été trop élevé. Elles ont plié sous la violence qui leur a été faite.
À défaut de vivre leurs convictions, elles font le minimum pour assurer leur survie.
Exemple : les esclaves
Dans une entreprise, ce type de profil est dangereux.
Ce sont des personnes blessées et telles des braises, elles peuvent repartir à la lutte à tout instant si l’opportunité se présente.
Les critiques
Ce groupe et le suivant reprennent les personnes qui peuvent parfois obéir et parfois désobéir.
Pour être plus précis, ces personnes obéissent à une instance autre et supérieure.
Et dans le cas des critiques, cette instance a pour vocation à défendre le collectif (une idée, une valeur…).
4. Les résistants
Ce sont des personnes qui désobéissent en conscience par moment pour lutter pour un idéal collectif avec des recours à des actes plus ou moins violents (grève, sabotage, …)
Cette violence est la matérialisation de besoins, parfois existentiels, non entendus et ni traités.
Exemple : Les syndicalistes (les vrais de convictions, pas les opportunistes)
Dans une entreprise, ce type de profil est fondamental. Il est le sifflet de la cocotte minute.
C’est grâce à ces profils que l’on peut identifier un mal-être important et décider d’agir avant l’explosion de l’ensemble de la structure.
Fondamental aussi car, malheureusement, pour se faire entendre, seule la violence permet d’obtenir l’attention et l’écoute attentive de l’autre.
5. Les militants
Ce sont des personnes qui désobéissent en conscience par moment pour défendre des idées sortant de la doxa en place.
Elles vont inviter les autres à ralentir pour mieux penser.
Comme le dit Frédéric Gros dans son livre Désobéir : « Penser, c’est se désobéir, désobéir à ses certitudes, son confort, ses habitudes. Et si on se désobéit, c’est pour ne pas être les traîtres de nous-mêmes ».
Exemple : Des associations comme UFC que choisir, Anticor ou la Quadrature du net
Dans une entreprise, ce type de profil est à mon sens le plus important.
C’est lui qui ramène de la morale et de l’éthique dans le quotidien.
Lui aussi qui permet d’avancer en conscience, dans l’alignement du sens, des valeurs et de nos besoins fondamentaux.
6. Les objecteurs de conscience
Ce sont des personnes qui sont animées par une idée, croyance.. forte et indéboulonnable.
Elles vont être dans un refus de faire quelque chose.
Le film « Tu ne tueras point » – 2016 – de Mel Gibson est un bel exemple.
Exemple : Refuser de couper l’eau à des personnes démunies.
Dans une entreprise, ce type de profil est, comme les résistants, un indicateur.
Mais ici pas de colère car plus lié à des problématiques de sens, de valeur, de morale et/ou d’éthique.
Les profiteurs
Comme les critiques, les profiteurs sont amenés à obéir et parfois désobéir
Comme les critiques, les profiteurs obéissent à une instance autre ou supérieure
Mais eux le font pour leur intérêt personnel
7. Les vandales
Ce sont des personnes qui cassent, dégradent ou volent au grand jour.
Pour le plaisir de, pour survivre, par rage… ce ne sont pas les raisons qui manquent.
Exemple : le hooligan
Dans une entreprise, ce type de profil est dangereux car s’il n’est pas géré, il expose le reste de l’équipe ou de la structure à de multiples risques.
8. Les arrivistes
Plus fourbe, ce sont des personnes qui vont discrètement jouer avec les règles, les tordre plus ou moins, les dépasser plus ou moins pour en tirer des bénéfices personnels contre l’intérêt collectif.
Manipulation et coup en douce au rendez-vous.
Exemple : bon nombre des hommes et femmes politiques
Dans une entreprise, ce type de profil est dangereux et pas forcément facile à détecter, car il se camoufle en collaborateur.
Promouvoir des arrivistes est source d’injustice avec son lot de conséquences.
Une fois détecté, il est important d’agir pour éviter qu’une équipe/structure ne s’effondre.
9. Les déserteurs
Ce sont des personnes qui se mettent en retrait du groupe car obéir leur est impossible ou trop douloureux.
Elles peuvent même aller jusqu’à acter leur départ du groupe.
Le pire est qu’en cas de crise, elles sont perçues comme des traîtres sans retour possible.
En arriver à de telle extrémité va à l’encontre de nos peurs viscérales de l’abandon et du rejet, c’est dire le mal-être qu’elles traversent.
Exemple : les déserteurs au front
Dans une entreprise, ce type de profil est en souffrance.
Il est primordial de l’accompagner et de l’aider à trouver une sortie dans un nouvel environnement pour un meilleur épanouissement.
Ne pas le faire c’est ouvrir la porte à en faire des vandales.
Infographie récapitulative
Tu l’auras compris, chercher l’obéissance n’est pas forcément la meilleure voie.
Je préfère de trèsssssssssss loin des militants, qui vont venir bousculer l’ordre établi pour un mieux commun en qui j’aurais confiance, que des collaborateurs bêtes et disciplinés.
" Ce qui menace la démocratie, aujourd’hui comme hier, ce n’est pas la désobéissance civile, mais l’obéissance servile. "
Jean-Marie Muller
Désobéir est un devoir en entreprise et dans la vie.
Je t’invite lors de tes prochaines rencontres avec les membres de ton équipe à identifier où chacun se situe actuellement.
Et surtout, favoriser une évolution au besoin
Comme d’hab’, garde l’esprit critique
Bonne fin de journée .
Laurent